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histoire des églises et chapelles de Lyon

donc de s’approprier ce titre, auquel tant de siècles l’avaient prédestinée, dans l’inoubliable journée du samedi 8 septembre 1900. Le diadème, étincelant de pierreries, de diamants, d’émeraudes, de rubis, sortis des écrins et des parures de famille, était le double symbole de la royauté qu’elle acclamait et de la perpétuelle fidélité dont elle renouvelait l’engagement.

Dès l’aube, des messes se célébrèrent sans interruption, à tous les autels de la basilique et de l’ancienne chapelle. À 7 heures, le cardinal Perraud commence la sienne, devant les délégués officiels des paroisses ; il reçoit la formule du vœu traditionnel de 1643, avec l’hommage du cierge et de l’écu d’or, promis par le prévôt et les échevins. À dix heures l’office pontifical est chanté à la Primatiale de Saint-Jean et on a dit que ce fut le plus beau du siècle.

Tout eût été parfait, tout eût été à louer dans la cérémonie de l’après-midi, si le temps, menaçant dès le matin, ne s’était gâté tout à fait et si la pluie ne fût tombée à torrents, au moment où s’organisait le cortège processionnel. On se résigne néanmoins ; les prélats font leur entrée par une porte latérale, et viennent occuper leurs sièges au chœur, où l’ordre et le recueillement se rétablissent instantanément. Leur groupement est superbe ; il comprend trois cardinaux, leurs Éminences Coullié, Langénieux, Perraud ; cinq archevêques. Nosseigneurs Ardin de Sens, Hautin de Chambéry, Servonnet de Bourges, Germain de Toulouse, Montély de Bérithe ; vingt-deux évêques et quatre abbés mitres. Le sermon est prononcé par Mgr de Cabrières, évêque de Montpellier avec une âme et une éloquence que les années n’ont pas refroidie. On lit un télégramme du cardinal Rampolla, annonçant que Sa Sainteté Léon XIII envoie sa bénédiction « avec effusion de cœur ». On entonne enfin les prières liturgiques du couronnement.

On a pensé qu’il convenait d’unir et d’auréoler, en même temps, d’un geste identique, les deux statues, celle si populaire de la chapelle du xiie siècle, priée par tant de générations, qui se sont succédé à ses pieds, et celle de la basilique, œuvre belle et pure du ciseau chrétien de Millefault.

Le cardinal Langénieux accomplit le premier couronnement ; l’archevêque de Lyon, pendant le chant du Salve Regina, procède au second. C’est au moment où l’on prononce les paroles de l’antienne sacrée : Advocata nostra, que ses mains abaissent lentement sur le front de la Vierge-Mère le plus superbe joyau qu’aucune impératrice ait porté. L’émotion est à son comble ; un courant magnétique secoue cette multitude priante d’un frisson général ; des larmes coulent de tous les yeux ; et je me demande encore comment le silence a été gardé et comment, de toutes parts, les acclamations, montées au bord de toutes ces bouches frémissantes, n’ont pas éclaté dans un soudain et irrésistible entraînement.

Malgré l’incertitude persistante d’un ciel, dont les nuages n’étaient pas tous dissipés, on se disposa à se rendre sous le péristyle, qui regarde la Saône, donner la bénédiction du Saint-Sacrement. Comme chaque année, au coup de six heures, le cardinal éleva l’ostensoir d’or, au-dessus de son peuple, agenouillé sur les quais, les ponts et la place Bellecour et il traça, sur les têtes inclinées, le signe de la croix, qui met en fuite les démons, le péché et la douleur. À la nuit tombée, la colline s’illumine soudain comme au