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Page:Martin - Poètes contemporains en Allemagne.djvu/263

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l’aise, et l’on est porté, comme par un reflux naturel, vers le dénoûment. Telle est la magie du talent : c’est le secret des vrais poètes.

On s’explique sans peine le succès d’un pareil morceau, ballade ou chanson épique, quel qu’en soit le nom. La Bohême surtout en fut émue, et il n’est pas étonnant que l’Autriche en ait pris ombrage. J’ai dit plus haut qu’elle conserva rancune au poète : le poète avait frappé juste, il avait touché au vif le sentiment populaire. L’empereur Joseph II, le philosophe réformateur, était resté dans la mémoire et dans le cœur du peuple : pour lui, l’empereur Joseph n’était pas mort ; il ne pouvait, il ne devait pas mourir. La France de notre époque a vu se reproduire ce sentiment : l’imagination de nos campagnes, si profondément ébranlée par la gloire de Napoléon, pouvait-elle se résoudre à croire, bien des années même après sa mort, que son héros avait cessé de vivre ?

Je pourrais arrêter ici mon ébauche, car cette pièce suffit pour donner la mesure du poète, et je dois, tant la matière abonde, me borner à des ébauches. Mais M. Maurice Hartmann aurait peut-être le droit de me reprocher de n’avoir révélé que le côté viril de son inspiration. Les vers suivants en dévoileront le côté gracieux. Ils sont tirés de cette fraîche idylle d’Adam et Ève qu’après les vaines agitations de la politique il sut heureusement puiser dans les ondes transparentes du lac de Genève.


La chanson du moine

Aujourd’hui, portant mes regards hors de ma cellule, j’ai vu un oiseau bleu qui bâtissait son petit nid contre le mur.