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positaires inviolables de l’idéal ? Quand la chaleur malsaine engendre par milliers les insectes qui rongent les fleurs et les fruits, serait-on malvenu à souhaiter qu’une pluie réparatrice tombât et détruisît enfin cette vermine malfaisante ?

Paulo minora canamus. Je reviens à mes… Allemands. Mon thème, je le rappelle, est de leur demander la fraîcheur et le secret de l’art naïf. Je sais que quelques esprits, peut-être un peu chagrins, me reprochent cette préoccupation persévérante d’une littérature étrangère, cette recherche des titres de poètes qui ne sont pas, qui ne peuvent pas être tous des génies hors ligne, des maîtres éminents. Il n’est pas donné à tout le monde d’être Gœthe ou Schiller : en fût-il autrement, Schiller et Gœthe s’appelleraient tout le monde ; les montagnes ne sont montagnes que parce qu’elles font saillie sur le niveau des plaines environnantes. Je contemple avec admiration les montagnes ; mais sur leurs cimes ne s’épanouit plus la douce fleurette que je retrouve avec émotion au fond des vallées où bruit la source. Quant à cette attention accordée à des inspirations nées ailleurs que sur notre sol, je ne crois pas avoir sérieusement à m’en justifier, et je persiste à penser qu’elle peut être utile. Sans doute la France contemporaine a vu se développer toute une génération de poètes dont plusieurs mériteraient d’être mieux connus, surtout mieux encouragés ; mais ce n’est pas un motif pour laisser dans l’oubli leurs émules des autres pays. Nous ne comprenons pas le patriotisme dans ce sens étroit. La France doit être une terre d’hospitalité intellectuelle. L’Allemagne n’est d’ailleurs pas d’un tempérament à