Page:Martin - Poètes contemporains en Allemagne.djvu/91

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

mandie. Tout ce qui suit alors, et particulièrement le récit des humiliations dont Gûdrûn est abreuvée et auxquelles elle oppose tant de noblesse d’âme, est d’une beauté telle que Guillaume Grimm n’hésite pas à ranger ce poëme parmi les plus remarquables chefs-d’œuvre de la poésie épique.

On cherche en vain dans Otnit, Wolfdietrich, Rosengarten et Alphart, la liaison, le charme et la vive haleine qui séduisent dans Gûdrûn et dans les Nibelûngen. La rudesse des mœurs y est en maint endroit choquante, quoique ce signe de l’ancienneté de ces poëmes ne soit pas non plus sans valeur. Dans le Rosengarten, Chriemhilt frappe du poing au visage une jeune fille qui s’est permis d’élever la voix en faveur de Rüdiger, et nous la voyons plus tard, dans un moment de mauvaise humeur, s’administrer à elle-même une correction semblable. Il y aurait beaucoup à citer en ce genre. Comment ne pas trouver trop crue, par exemple, la peinture de ce terrible moine Ilsan qui, après avoir tant abusé de la patience de ses bons frères, met le comble à ses méchants tours en les accrochant par la barbe aux clous plantés dans les murs du cloître, et en les forçant de la sorte à entonner des psaumes pour la rémission de ses propres péchés ? Évidemment cette création, à la fois énergique et burlesque, est une de ces épigrammes, quelque peu grossières, que la malice populaire décochait, vers la fin du XIIIe siècle, contre les habitudes mondaines, les envahissements temporels et les débordements du clergé.

Gervinus fait observer que, si le Roi Rother nous rappelle une de ces antiques légendes germaniques concernant le choix ou la conquête d’une fiancée, le