Page:Martin du Gard - Le Cahier gris.djvu/183

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deux mains sur le marbre, et, ponctuant chaque mot d’un mouvement du buste et des mains, elle articula : « Je — n’en — veux — plus. »

Jérôme ne répondit pas ; mais avant qu’elle eût pu s’écarter, il avait glissé à ses pieds et posé la joue contre sa hanche, comme un enfant qui veut forcer le pardon. Il balbutia :

— « Est-ce que je pourrais me séparer de toi ? Est-ce que je pourrais vivre sans mes petits ? Je me brûlerais la cervelle ! »

Elle eut presque envie de sourire, tant il mit de puérilité dans le simulacre qu’il fit vers sa tempe. Il avait pris le poignet de Thérèse, qui pendait le long de sa jupe, et le couvrait de baisers. Elle dégagea sa main, et lui caressa le front du bout des doigts, d’un mouvement inattentif et las, qui semblait maternel, qui prouvait son irrémédiable détachement. Il s’y trompa et redressa la tête ; mais il comprit à l’examen de son visage combien il se leurrait. Elle s’était éloignée aussitôt. Elle tendit le bras vers une pendulette de voyage qui était sur la table de nuit :

— « Deux heures ! » fit-elle, « Il est