Page:Martin du Gard - Le Cahier gris.djvu/25

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le jour même auprès du censeur, — ce brave M. Quillard », dit-il en se tournant vers Antoine ; « c’est un homme inflexible et qui a la triste expérience des internats. L’identification a été immédiate. Le garçon incriminé, qui signait D., est un élève de troisième, un camarade de Jacques, et se nomme Fontanin, Daniel de Fontanin. »

— « Fontanin ! Parfaitement ! » s’écria Antoine. « Tu sais, père, ces gens qui habitent Maisons-Laffitte, l’été, près de la forêt ? En effet, en effet, plusieurs fois cet hiver en rentrant le soir, j’ai surpris Jacques lisant des livres de vers que lui avait prêtés ce Fontanin. »

— « Comment ? Des livres prêtés ? Est-ce que tu n’aurais pas dû m’avertir ? »

— « Ça ne me semblait pas bien dangereux », répliqua Antoine, en regardant l’abbé comme pour lui tenir tête ; et, tout à coup, un sourire très jeune, qui ne fit que passer, éclaira son visage méditatif, « Du Victor Hugo », expliqua-t-il, « du Lamartine. Je lui confisquais sa lampe pour le forcer à s’endormir. »

L’abbé tenait sa bouche coulissée. Il prit sa revanche :