Page:Martin du Gard - Le Pénitencier.djvu/124

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ne lui sera pas disputé, plutôt que de risquer sa chance contre vous ! »

— « En êtes-vous bien sûr ? »

— « C’est officiel. J’ai rencontré le Secrétaire perpétuel à une réunion de l’Institut catholique, hier soir. Le Doyen venait d’apporter lui-même sa lettre de désistement. Une candidature qui aura duré moins de vingt-quatre heures ! »

— « Mais alors… ! », bredouilla M. Thibault. La surprise, la joie l’essoufflaient. Il fit quelques pas au hasard, les bras derrière le dos, puis vint au prêtre et faillit le saisir aux épaules. Il lui prit seulement les mains.

— « Ah, mon cher abbé, je n’oublierai jamais. Merci. Merci. »

Tant de bonheur venait d’entrer en lui que tout le reste était submergé ; sa colère fuyait à la dérive. Au point qu’il dut faire un appel à sa mémoire pour répondre, lorsque l’abbé, l’ayant, sans qu’il y prît garde, conduit dans son cabinet de travail, lui demanda, du ton le plus naturel :

— « Et qu’est-ce donc qui vous amenait de si bonne heure, mon cher ami ? »

Alors il se souvint d’Antoine, et retrouva d’emblée son emportement. Il venait de-