Page:Martin du Gard - Le Pénitencier.djvu/221

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

réfugier contre quelqu’un, il se détourna et s’abattit sur le traversin, en sanglotant. Un de ses bras restait en arrière ; Antoine toucha cette main crispée qui s’agrippa aussitôt à la sienne, et qu’il serra tendrement. Il ne savait que dire ; il regardait le dos courbé de son frère, que les sanglots secouaient. Une fois de plus, il avait la révélation de ce feu caché sous la cendre, toujours prêt à s’embraser ; et il mesurait la vanité de ses prétentions éducatrices.

Une demi-heure passa ; la main de Jacques se desserrait ; il ne sanglotait plus, il haletait. Peu à peu la respiration se fit plus régulière ; il s’endormait. Antoine ne bougeait pas, ne se décidait pas à partir. Il songeait avec angoisse à l’avenir de ce petit. Il attendit une demi-heure encore ; puis il s’en alla, sur le pointe des pieds, laissant les portes entr’ouvertes.


Le lendemain, Jacques dormait encore, ou feignait le sommeil, lorsqu’Antoine quitta la maison.

Ils se retrouvèrent en haut, à la table familiale. Jacques avait les traits fatigués, un pli méprisant aux coins des lèvres, et cet