Page:Martin du Gard - Le Pénitencier.djvu/229

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— « J’ai à travailler », fit-il sèchement. « Tu m’as déjà fait perdre assez de temps pour ce soir. Qu’est-ce que tu veux ? »

Jacques leva ses yeux qui restaient rieurs, et regarda son frère bien en face :

— « Je veux revoir Daniel », déclarat-il.

Il y eut un court silence.

— « Tu sais que père s’y oppose, » commença Antoine. « J’ai pris la peine de t’expliquer pourquoi. Tu t’en souviens ? Ce jour-là, il a été convenu entre nous que tu accepterais cet état de choses et ne ferais aucune tentative pour renouer les relations avec les Fontanin. J’ai eu confiance en ta parole. Tu vois le résultat. Tu m’as trompé ; à la première occasion, tu as rompu le pacte. Maintenant, c’est fini : jamais plus je ne pourrai avoir confiance en toi. »

Jacques sanglotait.

— « Ne dis pas ça, Antoine. Ce n’est pas juste. Tu ne peux pas savoir. C’est vrai que j’ai eu tort. Je n’aurais pas dû écrire sans t’en parler. Mais c’est parce qu’il y avait autre chose que j’aurais été forcé de raconter, et je ne pouvais pas. » Il murmura : « Lisbeth… »