Page:Martin du Gard - Le Pénitencier.djvu/230

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— « Il ne s’agit pas de ça », interrompit aussitôt Antoine, afin d’éluder un aveu qui l’eût gêné plus encore que son frère. Et, pour obliger Jacques à changer de sujet : « Je consens à tenter une nouvelle et dernière expérience : tu vas me promettre… »

— « Non, Antoine, je ne peux pas te promettre de ne pas revoir Daniel. C’est toi qui vas me promettre de me laisser le voir. Écoute-moi, Antoine, ne te fâche pas. Je te jure devant Dieu que je ne te cacherai plus rien. Mais je veux revoir Daniel et je ne veux pas le revoir sans que tu le saches. Lui non plus d’ailleurs. Je lui avais écrit de me répondre poste restante ; il n’a pas voulu. Écoute ce qu’il m’écrit : « Pourquoi poste restante ? Nous n’avons rien à dissimuler. Ton frère a toujours été pour nous. C’est donc à lui que j’adresse ce mot, qu’il te remettra. » Et, à la fin, il refuse le rendez-vous que je lui proposais derrière le Panthéon : « J’en ai parlé à Maman. Le plus simple serait que tu viennes aussitôt que possible passer un dimanche à la maison. Maman vous aime bien, ton frère et toi, elle me charge de vous inviter tous les deux. » Tu vois, il est loyal, lui. Papa ne s’en doute pas, il le condamne