Page:Martin du Gard - Le Pénitencier.djvu/247

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aboli, qu’il se fait accompagner par une maîtresse de rencontre le jour où il va souhaiter la fête de sa fille ! Et vous dites que je l’aime encore, non, ce n’est pas vrai ! » Elle s’était redressée ; elle semblait vraiment, à ce moment-là, le haïr.

Grégory la considéra sévèrement :

— « Vous n’êtes pas dans la vérité », dit-il. « Même en pensée, devons-nous rendre mal pour mal ? L’Esprit est tout. Le Matériel est esclave du Spirituel. Christ a dit… » Les aboyements de Puce lui coupèrent la parole. « Voilà votre damné barbu docteur ! » grommela-t-il, avec une grimace. Il courut reprendre sa chaise, et s’assit.

La porte s’ouvrit en effet. C’était Antoine, que suivaient Jacques et Daniel.

Il entrait de son pas résolu, ayant accepté les conséquences de cette visite. La lumière des fenêtres ouvertes frappait en plein son visage ; ses cheveux, sa barbe formaient une masse sombre ; tout l’éclat du jour se concentrait sur le rectangle blanc du front, auquel il prêtait le rayonnement du génie ; et, bien qu’il fût de taille moyenne, il eut un instant l’air grand. Mme  de Fontanin le regardait venir, et toute sa sympathie