Page:Martin du Gard - Le Pénitencier.djvu/272

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« Oh, la mal élevée ! » répéta-t-elle encore une fois, avec une insistance triomphante. Puis elle mit la chienne à terre, se leva, et fut s’accouder au balcon.

Cinq longues minutes s’écoulèrent dans un silence intolérable. Jacques n’avait pas bougé de sa chaise ; il étouffait. Dans la salle à manger, la voix de Mme  de Fontanin alternait avec celle d’Antoine. Jenny lui tournait le dos ; elle fredonnait un de ses exercices de piano ; son pied battait la mesure avec impertinence. Ah, elle raconterait tout à son frère, pour qu’il cessât de fréquenter ce malotru ! Elle le haïssait. À la dérobée, elle l’aperçut, rouge et digne. Son aplomb redoubla. Elle chercha ce qu’elle pourrait inventer afin de le blesser davantage.

— « Viens, Puce ! Moi, je m’en vais. »

Et. quittant le balcon, elle passa devant lui comme s’il n’existait pas, et se dirigea sans hâte vers la salle à manger.

Jacques craignit par-dessus tout, en restant là, de ne plus savoir ensuite comment s’en aller. Il la suivit donc, mais sans l’accompagner.

L’amabilité de Mme  de Fontanin changea son ressentiment en mélancolie.