Page:Martin du Gard - Le Pénitencier.djvu/31

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dans le silence dominical. Le battant s’ouvrit. Un molosse fauve, enchaîné à sa niche, aboya avec fureur. Antoine pénétra dans la cour : un jardinet plutôt, une pelouse entourée de graviers, et qui s’arrondissait devant le casernement principal. Il se sentait observé et n’apercevait aucun être vivant, si ce n’est le chien, qui, tirant sur sa chaîne, ne cessait de donner de la voix. À gauche de l’entrée s’élevait une petite chapelle surmontée d’une croix de pierre ; à droite, une construction basse, sur laquelle il lut : Administration. C’est vers ce pavillon qu’il se dirigea. La porte fermée s’ouvrit au moment où il atteignait le perron. Le chien aboyait toujours. Il entra. Un vestibule carrelé, peint en ocre et garni de chaises neuves, comme un parloir de couvent. La pièce était surchauffée. Un buste en plâtre de M. Thibault, grandeur naturelle, mais qui sur ce mur bas prenait des proportions colossales, décorait le panneau de droite ; un humble crucifix de bois noir, orné de buis, essayait de lui faire pendant sur le mur opposé. Antoine restait debout, dans une pause défensive. Ah non, il ne s’était pas trompé ! Tout puait la prison !