Page:Martin du Gard - Le Pénitencier.djvu/33

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Il obligea Antoine à s’asseoir et prit place à son bureau.

— « M. le Fondateur est en bonne santé ? » questionna-t-il de sa voix flûtée. « Il ne vieillit pas, il est extraordinaire ! Quel dommage qu’il n’ait pas pu vous accompagner ! »

Antoine inspectait les lieux d’un regard méfiant, et considérait sans complaisance cette figure de chinois blond et ces lunettes d’or derrière lesquelles deux petits yeux bridés papillotaient sans cesse avec une expression joyeuse. Mal préparé à cet accueil volubile, et fort dérouté de trouver sous l’aspect souriant d’un jeune homme en pyjama, ce directeur de bagne, qu’il imaginait sous les traits rébarbatifs d’un gendarme en civil, tout au plus d’un principal de collège, il eût besoin de faire un effort pour reprendre son aplomb.

— « Sapristi ! » s’écria soudain M. Faîsme, « mais c’est que vous arrivez juste pendant la grand’messe ! Tous nos enfants sont à la chapelle ; votre frère aussi. Comment faire ? » Il consulta sa montre. « Vingt minutes encore, une demi-heure peut-être, si les communions sont nombreuses. Et c’est possible. M. le Fondateur a dû vous le dire :