Page:Martineau - Dupleix et l’Inde française, tome 1.djvu/141

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le moment était venu de se corriger ; autrement l’âge l’empêcherait de profiter des bonnes occasions. Voulait-il toujours mener la vie d’un malheureux ? « Au nom de Dieu, mon cher ami, lui disait-il (5 juin), ne faites point tant de châteaux en Espagne et attachez-vous à une seule chose fixe qui puisse vous rapporter du bénéfice et où pouvez-vous le trouver, si ce n’est auprès de moi ? » Dupleix lui réservait le voyage de Chine dont le bénéfice assuré devait le mettre en situation de se passer de tout le monde.

Cependant Vincens avait fini par accepter ; il écrivit (10 août) qu’il partirait en février 1733. Dupleix lui répondit le 13 octobre :

« J’ai examiné en habile confesseur votre confession du 10 août, que la commère avait déchirée, aussi bien que la lettre du 11. L’une et l’autre me confirment de plus en plus qu’il faut que vous songiez promptement à gagner du bien. Vous ne le pouvez faire mieux qu’en profitant des offres que je vous ai faites et que je réitère encore. Je vous attends ici au mois de février ou de mars prochain. Vous ne pouvez presser la commère de vous suivre. Habituée à se voir au milieu de sa famille, elle aurait de la peine à la quitter ; aussi ne faites rien, mon cher compère, sans la consulter… Je compte fort sur la promesse que vous me faites de venir me trouver en février ; vous ne pouvez choisir une plus belle saison ; je vous attends donc, mais souffrez que je vous répète encore que je ne vous croirai que lorsque je vous saurai en rivière. Ne vous arrêtez pas aux discours des Jésuites, de Dubois, de la Bourdonnais. Ils ne songent qu’à leurs intérêts, non aux vôtres. Ils vous regardent comme leur homme d’affaires et se moquent de vous après que vous avez bien travaillé. Tous ces gens sont riches. Comment se sont-ils enrichis ? En naviguant. Depuis 1717 vous êtes dans l’Inde ; qu’avez-vous fait pendant ces quinze ans ? Où est votre fortune[1] ? »

  1. B. N. 8979, p. 53.