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jusqu’au mois de mai ou juin 1737. Alors il repassa à Pondichéry d’où il repartit pour le Bengale une quinzaine de jours plus tard par le Triton (7 août). « C’est une personne de mérite que nous avons vue avec plaisir », écrivait à son sujet le Conseil supérieur. Dupleix l’attendait comme un homme précédé de la réputation d’aimable cavalier. Il le reçut chez lui et l’hébergea pendant quatorze mois : les frais d’hospitalité devant être remboursés par son père en France ou par la Compagnie dans l’Inde. Ces frais s’élevèrent à 3.000 roupies. Pendant ce temps, il fut loisible à Godeheu de connaître dans tous les détails non seulement l’administration de Dupleix, mais la pensée même qui l’inspirait. Il connut ainsi plusieurs affaires importantes, notamment celle des roupies qui fut pour Dupleix l’occasion d’un franc conflit avec le Conseil supérieur, Dupleix ne lui cachait rien et ainsi s’établit entre eux une intimité sincère qui dura jusqu’en 1753. La façon dont elle se rompit est l’un des incidents les plus dramatiques et les plus poignants de notre histoire.

À quoi tiennent les destinées des peuples ? Il s’en fallut de peu que Godeheu n’épousât à Chandernagor l’une des filles de Madame Vincens et ne devint ainsi par la suite une sorte de gendre de Dupleix. Celui-ci voyait ce mariage avec déplaisir, il craignait qu’il ne lui causât de l’ennui en France, bien qu’à vrai dire il ne fut chargé de la conduite de qui que ce soit dans l’Inde. Fort heureusement la jeune fille avait d’autres visées. Avant même le départ de Godeheu elle épousa un Anglais nommé Barneval qui était une espèce de brute, mais l’un des plus riches partis de l’Inde. Dupleix fut charmé que la première affaire eut manqué. Lorsque Godeheu quitta l’Inde par le Comte de Toulouse, le 4 décembre 1738, l’alliance des deux