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tout l’Hindoustan était la meilleure sauvegarde de nos établissements. La disparition de Nadir Cha parut une délivrance ; ce fut au contraire une rupture d’équilibre. Les principes d’autorité qui tenaient les Européens dans un mutuel respect étaient anéantis ; il était désormais loisible d’entrevoir des luttes où les plus forts ne se soucieraient plus des droits de leurs concurrents et chercheraient à les supplanter. L’instrument de combat était forgé ; qui allait le ramasser ?


La mort de Sujah Khan survenue quelques semaines après n’était pas faite pour assurer la sécurité. Ce souverain qui régnait depuis douze ans n’était arrivé au trône et ne s’y était maintenu que par l’appui d’Agy Hamet et de Mirza Mohamed. Il était peu probable que cet appui serait continué à son fils et successeur Safras Khan. Agy Hametet Mirza Mohamed l’avaient fait écarter du trône en 1727, lorsque par une disposition testamentaire de Murchid Kouli Khan, il avait paru devoir régner au préjudice de son père. Obligés maintenant de le reconnaître comme leur souverain légitime, il était vraisemblable que Safras Khan chercherait à les détruire s’ils ne prévenaient eux-mêmes ses dispositions. Les peuples du Bengale eurent l’intuition du danger qu’ils allaient courir et les transactions commerciales furent de nouveau suspendues, comme aux jours où l’on craignait l’approche de Nadir Cha. Le conflit toutefois n’éclata qu’au bout de quelques mois ; Mirza Mohamed et son frère savaient quels avantages confère l’exercice du pouvoir souverain et Safras Khan n’ignorait pas de son côté la puissance de ses maires du palais. Si ce prince avait été attentif aux affaires publiques et aussi scrupuleux qu’on doit l’être dans le maniement des inté-