Page:Martineau - Dupleix et l’Inde française, tome 1.djvu/322

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des épreuves envoyées par Dieu pour affermir son caractère et fortifier sa volonté. Ce n’est point sa faute si malgré toutes ses peines et tous ses efforts il n’arriva pas à la fortune, qu’il considérait moins comme un but que comme un moyen d’acquérir de l’autorité et de la considération.

Toutes les affaires en effet ne réussissaient pas ; en dehors de l’aléa toujours dangereux d’achats mal conçus ou de ventes mal effectuées, il fallait compter avec les retards dans la navigation pouvant compromettre toute une campagne, avec l’insécurité des pays où l’on abordait, souvent troublés par les guerres intestines, et enfin avec les fatalités mêmes de la nature. Des navires faisaient naufrage et la cargaison était anéantie. Dupleix perdit ainsi pendant sa direction du Bengale des sommes très importantes sur quatre vaisseaux dont deux portaient des richesses de retour considérables. Les bénéfices des autres armements ne compensaient pas toujours ces pertes que le temps seul pouvait réparer. Et le temps, après une éclaircie plus ou moins longue, amenait fatalement un nouveau désastre. Ainsi d’espérance en désillusion on courait après la fortune sans jamais l’atteindre. Dans le commerce d’Inde en Inde, il n’y avait guère que les capitaines et subrécargues qui pussent faire des bénéfices certains, les capitaines par l’abus des port-permis et la fraude dans les embarquements, les subrécargues par leurs commissions de 3 %, dans les ventes effectuées et réalisées. Les armateurs et fréteurs n’avaient que des risques à courir.

Mais l’humanité aime les risques, autrement que vaudrait la vie ? Après une perte écrasante, il suffisait d’une grosse recette pour amorcer même de folles entreprises et certains voyages donnèrent 40 et même 55 % de béné-