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Page:Martineau - Dupleix et l’Inde française, tome 1.djvu/519

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disait-il, la tête plus dure qu’une enclume[1] ; en particulier, il ne craignait pas de les traiter avec rudesse ; la femme du conseiller Guillaudeu lui ayant manqué, semble-t-il, de convenances, il dénonça à son mari lui-même ses procédés malhonnêtes, son manque d’éducation, ses impolitesses outrées, ses discours méprisants, ses insultes perpétuelles[2].

La susceptibilité repose en principe sur un certain sentiment de justice dont elle est l’exagération ; Dupleix qui ne pouvait admettre les capitulations de conscience, n’admettait pas davantage qu’au cours ordinaire des événements la justice la plus stricte ne fut observée. Il n’était pas un sentimental s’attendrissant devant les infirmités morales de l’homme au point de lui faire oublier les fautes commises ; toute faute, d’après lui, devait recevoir son châtiment. « L’impunité d’un crime ou la diminution de la peine qui y est attachée en attire souvent de plus atroces », écrivait-il fort justement[3]. Par application de cette vérité si singulièrement méconnue de notre temps, il regretta un jour que le Conseil de guerre de Chandernagor n’eut condamné un soldat assassin qu’à la pendaison, alors que le châtiment ordinaire comportait la mort sur la roue. Lui-même jouissait comme directeur de nos établissements d’une autorité qui permettait aisément tous les abus de pouvoir ; on ne lui en reproche aucun, même à l’égard des Indiens pour lesquels il n’avait pas une affection désordonnée. Il ne jugeait qu’en Conseil les affaires qui lui étaient régulièrement soumises, mais combien de réclamations étaient réglées dans son cabinet par un arbitrage librement con-

  1. B. N. 8979, p. 29.
  2. Ars. 4743, p. 72.
  3. Ars. 4744, p. 45.