Page:Martineau - Dupleix et l’Inde française, tome 1.djvu/93

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d’un employé modeste pour obtenir de lui la cession de sa créance à très bon compte, à trop bon compte peut-être, mais cette faute ne justifiait pas la destitution. Certain de ne pouvoir être définitivement sacrifié, il préféra attendre à Pondichéry la justice de la Compagnie. Ce fut l’affaire de dix-huit mois, le temps d’un aller et retour de correspondance. Son frère intervint énergiquement en sa faveur, tandis que son père continuait de s’intéresser très médiocrement à ses succès et à sa fortune.

La décision des directeurs (30 septembre 1728) parvint à Pondichéry le 2 juillet 1729 par la Danaë : elle portait la réintégration de Dupleix dans le même rang qu’il avait auparavant et aux mêmes appointements. La cérémonie fut faite dès le lendemain sans provoquer le moindre incident.

Ce fut vraisemblablement cette affaire qui déchaîna entre Dupleix et Lenoir une animosité tenace, allant jusqu’à la haine, dont toute la correspondance du premier nous donne des preuves sans cesse renouvelées. Il faut reconnaître que Lenoir agit avec une autorité excessive en ne faisant pas d’enquête sur les déclarations de Lhuillier. Cultru suppose que, s’il fut aussi brutal, ce fut à la suite d’un rapport sur le commerce de la Compagnie envoyé directement par Dupleix, en France, le 8 octobre 1727, et qui aurait pu lui « paraître d’une inconvenance présomptueuse de la part d’un simple conseiller ». L’initiative de tels rapports appartient toujours aux gouverneurs ; nous ignorons les motifs pour lesquels Dupleix y substitua la sienne. Ce mémoire constituant un exposé général de nos établissements dans l’Océan Indien, Dupleix, qui n’en connaissait aucun, sauf Canton, n’avait pas de compétence spéciale pour être chargé de ce travail.