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la côte ? c’était à la cour seule du soubab qu’il fallait agir ; or, à ce moment Bussy n’était rien moins que disposé à retourner dans le Décan. La question resta donc en suspens, comme une conversation tombe faute d’objet et Goupil ne fut point autorisé à la poursuivre. On avait déjà quelque raison, sans mettre en cause sa bonne volonté, de se défier de son habileté et il apparaissait de plus en plus que l’affaire, plus ébruitée qu’il n’eut fallu, avait surexcité les esprits aussi bien à la cour qu’à la côte et qu’elle rencontrait des deux côtés une dangereuse opposition. Il n’était pas bien sûr d’autre part que l’idée n’eut pas été suggérée à Goupil par nos ennemis eux-mêmes pour nous discréditer davantage encore dans l’opinion des Indiens.

Bussy resta deux mois à Mazulipatam, où il fut fort bien accueilli. Moracin était un homme d’initiative et d’entendement qui savait s’élever jusqu’aux idées générales. Mis en confiance l’un et l’autre, les deux hommes se lièrent d’amitié et causèrent à cœur ouvert de leurs projets mais surtout de ceux de Dupleix dont dépendait leur avenir. Bussy ne dissimula pas à Moracin ses craintes au sujet du Décan et son désir de ne pas y retourner. Il n’appartenait point à Moracin de l’entretenir en cet état d’esprit ; sa double qualité de fonctionnaire et de parent de Dupleix le lui interdisait, mais que ne peut le temps contre les résistances les plus opiniâtres ? La fatigue elle-même se lasse, et Bussy était chaque jour encouragé par Moracin et même par son ami Marion du Mersan, inspirés l’un et l’autre par Dupleix[1], à retourner au Décan pour compléter l’œuvre qu’il avait si bien commencée.

  1. Dupleix écrivait à Moracin le 5 mai : « Les degrés militaires, but où il tend, lui seront plutôt acquis qu’en se rendant dans sa patrie si tôt où confondu avec un nombre infini de postulants, il recevra