Page:Martineau - Dupleix et l’Inde française, tome 4.djvu/177

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

« … Il serait assez singulier que nous ne puissions pas nous emparer d’un pays qu’on nous donne, sans la permission des Anglais… Si l’on craint les menées des Anglais et des Hollandais il ne fallait pas demander ces provinces ; on devait bien s’attendre à ce que l’acquisition de pareils domaines exciterait quelques rumeurs. Mais que feront ces rumeurs ? Il faut les dissiper ou par la force ou par la négociation. Je le répète, c’est au nom des Français qu’il faut en prendre possession et non au mien. Je suis ici au nom de la Nation et tout ce que je fais est en son nom et pour elle. » (B. N. 9158).

Moracin répondit à Bussy qu’il n’avait jamais jeté le manche après la cognée ; il avait seulement considéré qu’il y avait tout intérêt à ôter à notre prise de possession le nom ou même les apparences d’une affaire propre à la nation. Les Anglais, disait-il, s’étaient remués activement aussitôt qu’ils l’avaient connue ; le chef d’Ingeram avait déclaré qu’il périrait plutôt que de nous voir en possession des circars. Ils avaient fait tous leurs efforts pour réconcilier Jaffer Ali et Viziam Raja. Moracin avait été assez heureux pour empêcher cette liaison. Lorsqu’on serait bien ancré dans la province, on répondrait aux Anglais : Je règne, il n’est plus temps d’examiner nos droits.

« En vérité, mon cher ami, concluait Moracin, vous vous faites vis à vis des Anglais une délicatesse bien hors de place. Ils ne seront jamais susceptibles d’une pareille, lorsqu’elle pourra nuire à leurs intérêts ou à leur agrandissement. Il était de la dernière conséquence de les empêcher par quelque moyen que ce put être de mettre le nez dans cette affaire. Je vous avoue que je serais flatté qu’ils se plaignissent que je les ai trompés. Comme les Anglais sont trop arrogants pour convenir qu’on soit capable de les éconduire dans le maniement des affaires en tout genre, ils traitent de supercherie toute manœuvre qu’ils n’ont pas prévue et qui les met à l’écart. » (B. N. 9160, p. 41-42).