Page:Martineau - Dupleix et l’Inde française, tome 4.djvu/487

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Les Anglais cependant n’auraient jamais eu l’occasion de faire preuve ou d’user longuement de cette supériorité si, avant même l’affaire de Sriringam, Dupleix avait fait à l’avenir sinon au présent des concessions raisonnables ; il est toujours imprudent d’exiger trop de la fortune et les anciens conjuraient le mauvais sort en offrant quelque partie de leur bien aux génies occultes des destinées. Dupleix ne voulut jamais rien sacrifier. Il eut au moins une fois l’occasion de consolider ses avantages en faisant des concessions utiles sans que personne pût l’accuser de céder à la nécessité ; c’était au lendemain de la mort de Nazer j. et de l’avènement de son neveu au trône du Décan. Il suffisait de reconnaître à Mahamet Ali la possession de Trichinopoly, ce qui avec le Maduré et Tinivelly constituait encore un bel empire. Au lieu de lui faire cette proposition, Dupleix ne lui parla que d’une compensation dans le Décan, sans même le déterminer. C’était jouer la difficulté : le jeu se tourna contre nous. Mahamet Ali rebuté se rallia franchement aux Anglais dont il avait déjà secrètement sollicité le concours et de ce jour ce n’est plus seulement au nabab que nous eûmes affaire, c’est au gouverneur de Madras, représentant du gouvernement anglais. Il est d’ailleurs possible que, si Dupleix avait offert à Mahamet Ali Trichinopoly et le Maduré, l’offre aurait été déclinée ; du moins l’histoire ne pourrait-elle lui reprocher d’avoir tout perdu en voulant tout gagner. En cette nouvelle dignité, Mahamet Ali ne nous aurait peut-être pas témoigné grande reconnaissance ; dans l’Inde les fidélités sont toujours au comptant, rarement à terme ; mais l’expérience méritait d’être tentée.