Page:Martinov - De la langue russe dans le culte catholique, 1874.djvu/47

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dans l’Église catholique ne ferait que maintenir le fanatisme religieux dans le peuple ; elle assurerait au catholicisme le terrain qu’il occupe déjà et lui servirait de moyen de propagande au grand préjudice de l’orthodoxie russe.

M. Samarine professe une aversion profonde pour le chant des hymnes et des cantiques exécuté par les fidèles : « Ce qui attire le peuple dans les églises catholiques, dit-il, c’est d’abord leur nombre et leur magnificence, qui font un si grand contraste avec la pauvreté des temples orthodoxes ; c’est ensuite la musique de l’orgue comparée au misérable chant des Russes ; c’est enfin la satisfaction qu’éprouve le peuple de pouvoir prendre part au chant des cantiques, pour ne pas parler de la confession, de la prédication et des autres moyens dont disposent les ministres de la religion pour gagner les gens. Comment voulez-vous, s’écrie-t-il, que, dans une telle situation des choses, l’orthodoxie prospère et le catholicisme ne domine pas ? (P. 331.) Pour placer l’orthodoxie dans des conditions plus avantageuses, le concours du gouvernement est indispensable, pourvu qu’on n’aille pas introduire Ie russe dans les églises, car ce serait travailler de la manière la plus efficace non à la russification du pays, mais à la propagation du catholicisme dans les provinces occidentales, autant que dans l’intérieur de l’Empire. » (P. 332.)

La conclusion de M. Samarine est que la religion catholique n’étant, d’après les lois fondamentales de l’Empire, que tolérée, doit conserver son titre de culte étranger, et en cette qualité avoir à son usage une langue étrangère et non celle de la religion officielle, ni le polonais qu’il s’agit de proscrire. Reste le latin, et c’est ce que propose l’auteur du mémoire à la place des deux autres langues.

Ce n’est pas que M. Samarine méconnaisse les avantages de la russification du culte public. Il admet volontiers que c’est un moyen de rompre le lien qui unit le catholicisme à la nationalité polonaise et d’assurer à l’idiome officiel le rang qui lui convient ; malgré cela, il le rejette à cause des immenses périls dont serait menacée l’orthodoxie russe et qu’il ne croit pouvoir conjurer qu’en permettant de chanter seulement en latin. Encore ne fait-il cette concession que pour ne pas effaroucher les fidèles, habitués au chant de l’église, sans quoi il l’aurait tout simplement supprimé.