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ESSAI SUR LA LANGUE DE LA FONTAINE

choses par leur nom. C’est afin de le mieux faire sentir que nous avons tant insisté sur ces termes d’économie rurale, de vénerie, d’art militaire et de droit, qui animent si naturellement le récit. Leur emploi demande un goût et une habileté extrêmes ; mais ils ont une vivacité, une énergie qui disparaît dès qu’on cherche à les remplacer par des équivalents.

V

Les mots que les commentateurs regardent comme créés par La Fontaine, auraient mérité une attention toute particulière. M. Génin a fait voir que moutonnier a été attribué à tort au fabuliste[1]. Il en est de même pour beaucoup d’autres termes.

Dans sa description du château de Richelieu, notre auteur écrit à sa femme : « Je passerai sous silence les raretés de ces deux chapelles, et m’arrêterai seulement à un saint Jérôme tout de pièces rapportées, la plupart grandes comme des têtes d’épingles, quelques-unes comme des cirons… J’admirai non seulement l’artifice, mais la patience de l’ouvrier. De quelque façon que l’on considère son entreprise, elle ne peut être que singulière,

Et dans l’art de niveler,
L’auteur de ce saint Jérôme
Devoit sans doute exceller
Sur tous les gens du royaume.

« Ce n’est pas que je sache son pays, pour en parler franchement, ni même son nom ; mais il est bon de dire que c’est un François, afin de faire paraître cette merveille d’autant plus grande. Je voudrois, pour comble

  1. Problèmes philologiques ; Illustration, 4 juin 1853.