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PHILOLOGIE COMPARÉE SUR L’ARGOT

midi, le milieu du jour, par une métaphore tout à fait analogue à celle qu’employaient les Latins lorsqu’ils appelaient le centre d’une ville, umbilicus urbis, enfin stuc, pour part d’un larcin. Ce mot date au moins du xviiie siècle, car nous avons rencontré un arrêt de la Cour de parlement, du 22 juillet 1722, « portant condamnation d’être rompu vif… contre Cyr Cochois… convaincu de retirer chez lui nombre de voleurs, laronnesses et meurtriers de Paris ; d’avoir recelé les vols dont le partage se faisait dans sa cave, d’avoir le stuc, c’est-à-dire la part, et d’avoir acheté celle des autres. »

Rien n’est plus ordinaire à cette époque que de spécifier ainsi, dans les titres des arrêts, la nature des délits, en employant pour les désigner les mots en usage parmi les malfaiteurs ; les documents de ce genre mériteraient d’être fort soigneusement recherchés, car ils ont l’immense avantage d’être datés de la manière la plus précise. M. Francisque Michel n’a pas attaché aux renseignements chronologiques toute l’importance qu’ils méritent ; il explique, en général, avec exactitude, le sens et l’origine des expressions, mais il indique trop rarement où il les trouve pour la première fois.

Un censeur rigoureux lui reprocherait encore de n’avoir pas tracé son plan d’une main assez ferme. Souvent il emploie, pour se faire sa part, des procédés qui ne sont point à l’abri de la critique. Il dit, par exemple, à la page 191, « ce mot ayant été rejeté par l’Académie, nous sommes bien en droit de le considérer comme appartenant à l’argot ». Voilà un droit qu’il est permis de contester, et un pareil raisonnement pourrait conduire à d’étranges conséquences. Toutefois, nous ne blâmons pas l’auteur d’avoir cherché à agrandir le sujet qu’il a choisi ; mais si pour lui l’argot n’est plus seulement le vocabulaire secret des voleurs, s’il applique ce terme à cet assemblage d’expressions moqueuses,