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Chapitre II
Les qualités de l’atome


Il est contradictoire à la notion de l’atome d’avoir des propriétés ; car, comme dit Epicure, toute propriété est modifiable, tandis que les atomes ne se modifient pas[1]. Mais ce n’en est pas moins une conséquence nécessaire de leur attribuer ces propriétés. Car la pluralité des atomes de la répulsion, qui sont séparés par l’espace sensible, doivent être immédiatement différents entre eux et distincts de leur pure essence, c’est-à-dire posséder des qualités.

Dans les développements suivants, je ne tiens donc absolument pas compte de l’affirmation de Schneider et de Nürnberger, selon qui Epicure n’a pas attribué de qualités aux atomes et les § 44 et 54 dans la lettre à Hérodote, chez Diogène Laerte, sont interpolés. Si vraiment ils étaient interpolés, comment pourrait-on ôter toute valeur aux témoignages de Lucrèce, de Plutarque, voire de tous les auteurs qui parlent d’Epicure ? De plus, ce n’est pas dans deux paragraphes seulement que Diogène Laerte mentionne les qualités des atomes, mais dans dix : les 42, 43, 44, 54, 55, 56, 57, 58, 59 et 61. La raison que font valoir ces critiques « qu’ils ne sauraient accorder les qualités de l’atome avec son concept », est bien faible. Spinoza dit que l’ignorance n’est pas un argument. Si chacun voulait raturer chez les anciens les passages qu’il ne comprend pas, on arriverait bien vite à la tabula rasa !

Par les qualités, l’atome acquiert une existence qui contredit à son concept; il est posé comme un être-là aliéné,

  1. . Diog. X 54 ; Lucrèce II 861 sq.