Page:Marx - Différence de la philosophie de la nature chez Démocrite et Épicure.djvu/254

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

différent et séparé de son essence. Cette contradiction est ce qui constitue l’intérêt capital d’Epicure. Sitôt donc qu’il pose une propriété, tirant la conséquence de la nature matérielle de l’atome, il contrepose en même temps des déterminations qui anéantissent de nouveau cette propriété dans sa propre sphère et font prévaloir, au contraire, le concept de l’atome. Il détermine donc toutes les qualités de telle façon qu’elles se contredisent elles-mêmes. Au contraire, Démocrite ne considère nulle part les propriétés en rapport à l’atome lui-même, et n’objective pas non plus la contradiction entre concept et existence qu’elles contiennent. La seule chose qui l’intéresse est plutôt de présenter les qualités en rapport à la nature concrète qui doit en être formée. Elles ne sont pour lui que des hypothèses servant à expliquer la diversité phénoménale. Le concept de l’atome n’a donc rien à voir avec elles.

Pour démontrer notre affirmation, il est tout d’abord nécessaire de nous mettre au courant des sources qui semblent se contredire sur ce point.

Dans l’écrit De placitis philosophorum, on lit : « Epicure affirme que ces trois qualités appartiennent aux atomes : la grandeur, la figure, la pesanteur. Démocrite n’en admettait que deux : la grandeur et la figure ; Epicure y ajouta en troisième la pesanteur[1]. Le même passage figure, répété mot pour mot, dans la Praeparatio evangelica d’Eusèbe[2].

Il est confirmé par le témoignage de Simplicius[3] et de Philopon[4] d’après lequel Démocrite n’a attribué aux atomes que la différence de la grandeur et de la figure. En opposition directe avec ces témoignages se trouve Aristote qui, dans le premier livre du De generatione et corruptione assigne aux atomes de Démocrite des différences de pesanteur[5]. À un autre endroit (dans le premier livre du De

  1. . Pseudoplut. 877 E ; cf. Sext. Emp. adv. dogm. IV 240.
  2. . Eusèb. XIV 749.
  3. . Simpl. p. 362.
  4. . Philop. p. 362.
  5. . Arist. de gen. et corr. 362 a.