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Chapitre IV
Le temps


Comme, dans l’atome, la matière est, en tant que pure relation à soi, dispensée de toute mutabilité et de toute relativité, il découle immédiatement que le temps est à exclure du concept de l’atome, du monde de l’essence. Car la matière n’est éternelle et autonome que dans la mesure où il est fait, en elle, abstraction du moment de la temporalité. Sur ce point encore, Epicure et Démocrite sont d’accord. Mais ils diffèrent par la manière dont le temps, écarté du monde des atomes, est ensuite déterminé, ainsi que par la sphère où il est transporté.

Selon Démocrite, le temps n’a aucune importance et aucune nécessité pour son système. S’il explique le temps, c’est pour le supprimer. S’il le détermine comme éternel, c’est pour que, comme le disent Aristote[1] et Simplicius[2], la naissance et la mort, c’est-à-dire le temporel, soient écartés des atomes. C’est lui-même, le temps, qui doit fournir la preuve que tout n’a pas nécessairement une origine, un moment du commencement.

Il faut reconnaître ici quelque chose de plus profond. L’entendement imaginant, qui ne conçoit pas l’être-autonome de la substance, pose la question du devenir temporel de cette substance. Il lui échappe alors qu’en faisant de la substance quelque chose de temporel, il fait en même temps du temps quelque chose de substantiel, et en détruit le concept, car le temps rendu absolu n’est plus temporel.

  1. . Arist. phys. 251 b.
  2. . Simpl., p. 426.