Page:Marx - Différence de la philosophie de la nature chez Démocrite et Épicure.djvu/270

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Mais, d’un autre côté, cette solution n’est pas satisfaisante. Le temps, exclu du monde de l’essence, est transféré dans la conscience de soi du sujet qui philosophe, mais ne touche pas le monde lui-même.

Il en va autrement avec Epicure. Selon lui, le temps, exclu du monde de l’essence, devient la forme absolue du phénomène. Le temps est en effet défini comme l’accident de l’accident. L’accident est la modification de la substance en général. L’accident de l’accident est la modification en tant que se réfléchissant en soi, le changement comme changement. Le temps est maintenant cette pure forme du monde, phénoménal[1].

La composition est la forme purement passive de la nature concrète, le temps en est la forme active. Si je considère la composition d’après son être-là, l’atome existe derrière elle, dans le vide, dans l’imaginaire ; si je considère l’atome d’après son concept, ou bien la composition n’existe pas du tout, ou bien elle n’existe que dans la représentation subjective ; car elle est une relation dans laquelle les atomes indépendants, refermés sur eux-mêmes, qui se désintéressent en quelque sorte les uns des autres, ne sont pas davantage rapportés les uns aux autres. Le temps, au contraire, le changement du fini, du fait qu’il est posé comme changement, est aussi bien la forme effectivement réelle qui sépare le phénomène de l’essence, le pose comme phénomène au même titre qu’il le ramène à l’essence. La composition exprime maintenant la matérialité aussi bien des atomes que de la nature qui naît de ces atomes. Le temps, par contre, est, dans le monde du phénomène, ce que le concept de l’atome est dans le monde de l’essence : l’abstraction, l’anéantissement et le retour à l’être pour soi de tout être-là déterminé.

De ces considérations découlent les conséquences suivantes : en premier lieu, Epicure fait de la contradiction

  1. . Lucrèce I 459.461 sq. 479 sq. ; Sext. Emp. adv. dogm. IV 219 ; cf. Stob. ibid.