Page:Marx - Différence de la philosophie de la nature chez Démocrite et Épicure.djvu/87

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Mais le mérite de Hegel est ici expressément reconnu :

Mais bien que, grâce à son quiproquo, Hegel défigure la dialectique par le mysticisme, ce n’en est pas moins lui qui en a le premier exposé le mouvement d’ensemble. … Sous son aspect mystique, la dialectique devint une mode en Allemagne, parce qu’elle semblait glorifier les choses existantes. Sous son aspect rationnel, elle est un scandale et une abomination pour les classes dirigeantes… parce que dans la conception positive des choses existantes, elle inclut du même coup l’intelligence de leur négation fatale, de leur destruction nécessaire, parce que, saisissant le mouvement même dont toute forme faite n’est qu’une configuration transitoire, rien ne saurait lui en imposer ; parce qu’elle est essentiellement critique et révolutionnaire[1]. (Nous soulignons.)

On ne saurait être plus clair. La pensée du Capital est une pensée dialectique. Mais ce qui marque la coupure profonde qui sépare Marx de Hegel, c’est moins l’idée du « renversement » (dont on sait trop bien désormais qu’elle n’est pas claire) que la place exacte donnée par Marx à la dialectique.

Dans ce texte de 1873, Marx distingue en effet deux plans de la manière la plus nette : le procédé d’exposition et le procédé d’investigation.

Certes, le procédé d’exposition doit se distinguer formellement du procédé d’investigation. À l’investigation de faire la matière sienne dans tous ses détails, d’en analyser les diverses formes de développement, et de découvrir leur lien intime. Une fois cette tâche accomplie, mais seulement alors, le mouvement réel peut être exposé dans son ensemble. Si l’on y réussit, de sorte que la vie de la matière se réfléchisse dans sa reproduction idéale, ce mirage peut faire croire à une construction a priori[2].
  1. Ibidem, p. 559.
  2. Postface, éd. cit., p. 558.