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tence de celui-ci, et l’existence de ce dernier pour lui[1] ». Dans cette volonté de s’opposer à toute réduction de l’objet ou du sujet et de découvrir l’universalité dans le champ de l’objectivité, Marx semble développer et concrétiser le schéma que la Dissertation de 1841 donnait pour être celui du ciel. Dans le ciel en effet, la contradiction était acceptée et éteinte, rendue positive de par sa concrétion même, et seulement grâce à elle. Le mouvement absolument libre des corps célestes reposait sur la réalité effective de la singularité (subjectivité) et de la matière (centre universel de la pesanteur). Le ciel était la totalité unissant les deux termes. Dans la matière céleste, les deux moments reconnaissaient leur interdépendance et leur appartenance mutuelle sans pour autant se fondre l’un dans l’autre. La production pourrait ainsi apparaître comme la découverte du ciel sur la terre. En fait, il n’en est pas ainsi : la représentation du ciel contenue dans la Dissertation est celle du matérialisme philosophique. Sa valeur polémique à l’égard de toute spéculation ne saurait faire oublier qu’elle reste prisonnière du schéma spatial, du couple reflet-reflétant et de la contradiction formelle qui caractérisent l’idéologie. « Feuerbach veut des objets concrets, réellement distincts des objets de la pensée, mais il ne considère pas l’activité humaine elle-même en tant qu’activité objective[2]. » La production entraîne une révolution dans le statut de l’objectivité. Si elle fait valoir la dimension de l’objet contre la spéculation, elle le conteste dans la détermination que lui donne le matérialisme philosophique. « Le principal défaut, jusqu’ici, du matérialisme de tous les philosophes — y compris celui de Feuerbach — est que l’objet, la réalité, le monde sensible n’y sont saisis que sous la forme d’objet ou d’intuition, mais non en tant qu’activité humaine concrète, non en tant que pratique, de façon subjective[3]. » On voit que le matérialisme dialectique récuse à la fois le matérialisme et l’idéalis-

  1. . Manuscrits de 1844, éd. cit., p. 89.
  2. . Idéologie allemande, éd. cit., p. 31.
  3. . Ibidem.