Page:Marx - L’Allemagne en 1848.djvu/186

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parer du pouvoir aussitôt que l’insurrection eut éclaté bien malgré elle, et elle n’employa ce pouvoir qu’à détruire les effets de l’insurrection. Partout où un conflit armé amena à une crise sérieuse, les boutiquiers demeurèrent frappés d’effroi en présence de la situation dangereuse qui leur était faite, en présence du peuple qui avait pris au sérieux leurs vaniteux appels aux armes, en présence du pouvoir qui se trouvait ainsi leur être imposé, en présence, surtout, des conséquences que comportait pour eux-mêmes, pour leurs positions sociales et pour leurs fortunes, la politique dans laquelle ils étaient forcés de s’engager. Ne s’attendait-on pas à les voir risquer « la vie et la propriété », comme ils le disaient toujours, pour la cause de l’insurrection ? N’étaient-ils pas forcés de prendre des positions officielles dans l’insurrection, ce qui, dans le cas d’une défaite, pouvait amener la perte de leur capital ? Et, dans le cas d’une victoire, n’étaient-ils pas certains d’être immédiatement mis à l’écart et de voir leur politique tout entière bouleversée par les prolétaires victorieux, qui formaient le gros de l’armée des combattants ? Placée ainsi entre les dangers contraires qui l’entouraient de tous les côtés, la petite bourgeoisie ne sut se servir de son pouvoir que pour abandonner les choses à elles-mêmes, perdant ainsi toute chance de succès qu’il y aurait pu avoir et tuant complètement l’insurrection. Sa politique, ou plutôt son absence de politique, était