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la lutte des classes en france

s’élever aussi bien entre les différentes fractions du parti de l’ordre, qu’entre l’Assemblée nationale et Bonaparte. Beaucoup de choses étaient faites pour déplaire à l’Assemblée : Bonaparte, immédiatement après « son coup d’Etat », après la constitution d’un ministère bonapartiste proprement dit, mandait devant lui les invalides de la monarchie, nommés préfets, et faisait de leur agitation inconstitutionnelle en faveur de sa réélection à la présidence la condition de leur maintien dans leur fonction. Carlier célébrait son installation par la fermeture d’un club légitimiste. Bonaparte fondait un journal particulier, le Napoléon, qui confiait au peuple les intentions secrètes du président que ses ministres étaient obligés de démentir à la tribune de la Législative. Bien des choses semblaient peu plaisantes : le maintien insolent du ministère malgré les votes de défiance répétés ; la tentative de se concilier la faveur des sous-officiers par une haute-paie journalière de quatre sous, et la faveur du prolétariat par un plagiat des Mystères d’Eugène Sue, par une banque de prêts sur l’honneur ; l’impudence enfin avec laquelle on faisait proposer par les ministres la déportation à Alger des derniers insurgés de Juin pour frapper « en gros » la Législative d’impopularité, alors que le président conservait sa popularité « en détail » par des grâces isolées. Des paroles menaçantes tombèrent de la bouche de Thiers qui parla de « coups d’État » et de « coups de tête ». La Législative se vengea de