au moyen de les payer avec les 600.000 francs que t’alloue la constitution, à moins que tu ne préfères partir pour Clichy le deuxième lundi du joli mois de mai ! Si la constitution attribue au président le pouvoir réel, elle tente d’assurer à l’Assemblée nationale le pouvoir moral. Outre qu’il est impossible de créer un pouvoir moral au moyen d’articles de loi, la constitution se détruit ici elle-même en faisant élire au suffrage direct le président par tous les Français. Tandis que les suffrages de la France se dispersent sur les sept cent cinquante membres de l’Assemblée nationale, ils se concentrent ici sur un unique individu. Alors que chaque député ne représente que tel ou tel parti, telle ou telle ville, telle ou telle tête de pont, ou même la simple nécessité d’élire un sept cent cinquantième quelconque, opération dans laquelle on se montre peu difficile tant sur l’homme que sur la chose, Lui est l’Élu de la nation et son élection est l’atout que le peuple souverain joue tous les quatre ans. Un rapport métaphysique réunit l’Assemblée nationale élue et la nation, mais le président élu est en rapport personnel avec cette dernière. L’Assemblée nationale traduit bien par ses divers représentants les faces multiples de l’esprit national, il s’incarne dans le président. Il a sur elle l’avantage d’un droit divin particulier, il est par la volonté du peuple.
Thétis, déesse de la mer, avait prophétisé à Achille qu’il périrait dans la fleur de sa jeunesse.