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le xviii brumaire de louis bonaparte
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l’Assemblée, (ces classes mettent en effet autant d’ardeur à défendre les prérogatives parlementaires que l’Assemblée), les bourgeois qui ne sont pas au Parlement ne comprennent pas que ceux qui s’y trouvent puissent dissiper leur temps en querelles aussi mesquines et exposer la tranquillité publique par d’aussi misérables rivalités avec le président. La bourgeoisie est déconcertée par une stratégie, qui consiste à conclure la paix au moment où tout le monde attend la bataille, et à attaquer à l’instant où chacun croit la paix signée.

Le 20 décembre, Pascal Duprat, interpellait le ministre de l’intérieur sur la loterie des lingots d’or. Cette loterie était une « fille de l’Élysée ». Elle devait le jour à Bonaparte et à ses fidèles, et le préfet de police, Carlier, l’avait prise officiellement sous sa protection, bien que la loi française interdit toutes les opérations de ce genre à moins qu’elles ne fussent destinées à un but de bienfaisance. Il y avait sept millions de billets, le billet valait un franc pièce, et le bénéfice était soi-disant destiné à embarquer pour la Californie des vagabonds parisiens. Les rêves dorés devaient supplanter les songes socialistes du prolétariat de Paris, et la perspective illusoire du gros lot remplacer le doctrinaire droit au travail. Les ouvriers de Paris ne reconnaissaient naturellement pas, sous l’éclat des lingots californiens, les francs ternis qu’on leur tirait de la poche ; mais, en somme, il s’agissait d’une escroquerie pure et simple. Les