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la lutte des classes en france

troupes, elle discutait sur son droit de réquisition : n’était-ce pas avouer qu’elle doutait de son propre pouvoir ? En rejetant la proposition des questeurs, elle proclama ouvertement son impuissance. Cette proposition tomba avec une minorité de 108 voix. La Montagne avait fait pencher la balance. Elle se trouvait ainsi dans la posture de l’âne de Buridan ; elle ne se trouvait pas entre deux bottes de foin, et n’avait pas à choisir celle des deux qui lui paraissait la plus séduisante : placée entre deux volées de coups de bâton, il lui fallait décider quelle serait la plus pénible. D’un côté, elle avait à craindre Changarnier, de l’autre Bonaparte. Il faut avouer que la situation n’avait rien d’héroïque.

De plus, le 18 novembre, on présenta un amendement à la loi sur les élections communales, proposée par le « parti de l’ordre », amendement d’après lequel une année de domicile, au lieu de trois ans, était déclarée suffisante pour les électeurs municipaux. L’amendement fut repoussé par une seule voix, et encore cette voix de majorité fut reconnue être due à une erreur. Le « parti de l’ordre », en se résolvant en ses fractions ennemies, avait depuis longtemps perdu sa majorité parlementaire indépendante. On voyait qu’il n’y avait plus de majorité du tout dans le Parlement. L’Assemblée nationale était devenue incapable. Ses éléments atomiques n’étaient plus réunis par une force de cohésion quelconque ; elle avait