Page:Marx - Misère de la philosophie.djvu/164

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Sixième observation.


Prenons avec M. Proudhon le chemin de traverse.

Nous voulons bien que les rapports économiques, envisagés comme des lois immuables, des principes éternels, des catégories idéales, fussent antérieurs aux hommes actifs et agissants ; nous voulons bien encore que ces lois, ces principes, ces catégories eussent, dès l’origine des temps, sommeillé « dans la raison impersonnelle de l’humanité ». Nous avons déjà vu qu’avec toutes ces éternités immuables et immobiles, il n’y a plus d’histoire ; il y a tout au plus l’histoire dans l’idée, c’est-à-dire l’histoire qui se réfléchit dans le mouvement dialectique de la raison pure. M. Proudhon, en disant que, dans le mouvement dialectique, les idées ne se « différencient » plus, a annulé et l’ombre du mouvement et le mouvement des ombres, au moyen desquels on aurait pu tout au plus encore créer un simulacre de l’histoire, Au lieu de cela, il impute à l’histoire sa propre impuissance, il s’en prend à tout, jusqu’à la langue française. « Il n’est donc pas exact de dire, dit M. Proudhon le philosophe, que quelque chose avient, quelque chose se produit : dans la civilisation comme dans l’univers, tout existe, tout agit depuis toujours. Il en est ainsi de toute l’économie sociale. » (Tome II, p. 102.)