Page:Marx et Engels - Le manifeste communiste, II.djvu/74

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de l’ordre instinctivement réalisée par l’humanité est spécifiée par séries hiérarchisées de besognes, à ce point que chaque nouvelle division du travail, même dans les besognes les plus humbles, crée « un nouveau droit de suzeraineté et de privilège[1] ».

Mais l’idée marxiste a une seconde face. Elle explique comment se sont simplifiés ces antagonismes complexes, jusqu’à se réduire à un seul couple antagonique : la bourgeoisie et le prolétariat. Cette explication est économique. « La différenciation sociale des hommes résulte de la production économique[2] » et se modifie avec elle. Le Manifeste esquissera cette évolution.

Il n’y arrivera pas sans artifice. Un schématisme domine cette description : l’évolution économique fait monter à la prépondérance la classe opprimée de l’âge précédent. « Les serfs du moyen-âge engendrèrent les bourgeois des premières communes» » Bien qu’emprunté à Bazard, cela est très inexact[3]. Ni les citoyens des villes gallo-romaines ou italiques du haut moyen-âge ne sont issus de serfs, ni le servage en Germanie même n’est aussi ancien que la classe des paysans libres ; et il y a eu des agglomérations communales d’hommes libres dès les temps germaniques primitifs.

  1. Proudhon. Création de l’ordre, p. 406.
  2. F. Engels. Préface de 1883.
  3. Bazard avait dit : « Les communes, c’est-à-dire les corporations d’industriels autrefois serfs ». Doctrine, p. 466.