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une assertion dogmatique de quelques hommes qui ont froidement étudié le genre humain dans des livres, et je dis, contradictoirement à leur opinion, que la régulation des passions n’est pas toujours sagesse. — Il semble au contraire que si les hommes ont plus de jugement et plus de courage que les Femmes, c’est parce qu’ils donnent un plus libre cours aux grandes passions, et que s’égarant plus fréquemment, leur esprit profite de leurs écarts. S’ils peuvent donc arriver par l’exercice de leur propre raison à quelques principes invariables, ils doivent probablement en remercier la force de leurs passions, qui s’est nourrie par de faux apperçus de la vie, et qui leur a fait franchir des limites qu’ils n’auroient jamais dépassées[1]. Mais si, dans le commencement de la vie, on nous en montre froidement toutes les scènes ; s’il nous est donné de voir toutes les choses sous leurs vraies couleurs, comment les passions acquerront-elles une force suf-

  1. « Tout cela, dit Sydnei, n’est que science de langue à laquelle il manque l’expérience. »