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Page:Masoin - Nadine, 1914.djvu/122

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Quand elle avait appris par des bouches amies
Le retour de l’aimé. L’espérance endormie
S’élançait en chantant des murs de sa prison
Vers les cimes d’azur d’un nouvel horizon.
Puis, des doutes cruels l’étreignaient de leurs serres.
Coupable ? Qui l’était ? Qui avait chassé Pierre ?
L’aimerait-il encor ? N’était-il pas trop tard
Pour tendre vers l’amour, comme les nénuphars
Sur les nappes de paix tendent leurs lèvres pâles
Aux baisers parfumés des brises matinales ?
Mais, du moins, le revoir ! pour qu’il lui fût donné
D’entendre à ses aveux Pierre lui pardonner !
C’était son seul désir. Elle pourrait encore
Se confier à la vie et renaître à l’aurore !

Elle marchait ainsi dans les derniers rayons,
Lorsque soudain surgit une apparition :
Pierre était devant elle. Elle n’eut qu’un cri : Pierre !
Et sa voix s’éteignit, et ses bras supplièrent
Vibrants, tendus vers lui en un geste infini
De détresse lassée où se trouvaient unis
L’abandon et l’amour ouvrant larges leurs ailes
Pour monter, comme l’oiseau, vers le nid fidèle.

— Pierre ! Pierre ! dit-elle.
— Pierre ! Pierre ! dit-elle. Et Pierre recula.
— Arrière ! cria-t-il : c’est donc toi, te voilà !
Abîme de mensonge ! exécrable mégère !
Qui me chantais l’amour de ta voix de vipère.



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