Page:Masoin - Nadine, 1914.djvu/35

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La verte chevelure, et dociles tombaient
Les touffes sous ses doigts. Elle les étendait
Sur un drap blanc de neige, y entassait les gerbes
Plongeant à pleines mains dans l’arôme des herbes,
Puis ayant pris les bouts joints par un nœud serré
Sur l’épaule elle tint son fardeau assuré
Et s’en fut. Le soleil achevant sa carrière
Allongeait le profil de ses formes légères.

Heure douce et sereine ! Aux rayons du couchant
S’empourpraient les taillis d’où pleuvaient mille chants
Et des rires rosés perlaient de la rivière
Qui bondissait joyeuse au seuil de chaque pierre.
Toute chose exhalait des parfums de bonheur
Et Nadine sentait comme pleurer son cœur,
Et des ailes battaient dans son âme, vibrantes.

Oh ! la mélancolie aux douceurs enivrantes
Qui pèse sur nos fronts couronnés de vingt ans
Quand montent dans le soir les encens du printemps !
Comme elle nous étreint de ses baisers de femme
Sans qu’on sache comment ni pourquoi dans notre âme,
Comme un rayon de lune au sein profond des eaux,
Elle verse son rêve et les désirs nouveaux,
Pourquoi le ciel criblé de paix et de mystère
Vêt-il nos pauvres cœurs d’éternelles chimères ?
Et pourquoi suffit-il d’une étoile aux yeux doux
Pour pleurer de bonheur en tombant à genoux ?



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