Page:Masoin - Nadine, 1914.djvu/36

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Là-bas dans le couchant, dormaient les toits tranquilles
Leur aile repliée ; un clocher immobile
Trouait les champs d’azur de sa lame d’argent
Et les splendeurs du soir dans la pourpre nageant
Mouchetaient les taillis d’ardentes étincelles
Et tissaient à leur front des trames de dentelle.
Nadine s’avançait. Aulnes et noisetiers
Tendaient leurs bras touffus sur l’ombre du sentier
Dont le fil ondulait comme le cou d’un cygne.
Là-haut se pourchassaient dans les clartés insignes
Les hirondelles, et des vols de moucherons
Palpitaient au plaisir de leurs valses en rond.
Les forêts embaumaient de leur suave haleine
Et d’une immense paix l’heure était toute pleine.
Nadine dans son cœur suivait les voix du ciel,
Du printemps, de la terre ; et des douceurs de miel
Dans son âme coulaient toute heureuse de vivre.
Jamais rêve plus pur n’ouvrait un plus beau livre !

Elle atteignit bientôt les bras du carrefour
Qu’un vieux chêne tordu ombrageait alentour ;
Sous son dôme pleurait la détresse poignante
D’un crucifix de bois aux blessures saignantes.
Ayant posé son faix, Nadine vint s’asseoir
Sur le talus de mousse aux derniers feux du soir.

En ce moment un pas retentit sur la route,
Une lèvre chantonne et Nadine l’écoute.



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