Page:Masoin - Nadine, 1914.djvu/77

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Dis-lui qu’il est trop tard pour les amours fidèles
Et qu’il n’est point de trop pour toi d’être infidèle,
Que tu vas épouser quelque autre plus rangé…

Nadine écoutait l’homme et voyait voltiger
Autour d’elle dans l’air comme des ailes noires.
Elle ne pouvait pas et ne voulait pas croire
Aux paroles de mort du perfide meunier.

L’autre continua :
L’autre continua : — Je ne puis le nier,
Nous avons eu des torts à ton égard, Nadine,
Mais à les réparer, volontiers, je m’incline.
Même s’il nous en coûte, à mettre l’avenir
De tes jours à l’abri nous saurons parvenir,
Foi de meunier ! On peut sécher de sa richesse
Quelques pleurs passagers et dorer la tristesse !
Écris donc cette lettre ; ici, c’est le bonheur…

— Oui, pour vous, dit Nadine, et pour moi, le malheur !
Vous revivrez de l’un, et je mourrai de l’autre.
Et à nos deux bonheurs, vous préférez le vôtre,
Et voulez que je mente et que je dise non
À tous les rêves bleus qui ont ri sur mon front !
Ne plus l’aimer ! Lui, Pierre, auquel mon être aspire
Comme au soleil les fleurs, comme au port le navire !
Je comprends maintenant ! Je ne suis rien pour vous
Qu’un jouet qu’un enfant brise sous ses genoux



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