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quelques lettres

cette lénité de notre droit pénal à l’égard des scélérats n’est pas cause de la recrudescence qu’on note dans la criminalité. Car, évidemment, notre droit ne distingue pas entre aubains et nationaux. Le gangster de Chicago qui vient faire un coup à Montréal bénéficie des mêmes privilèges légaux que Baptiste Ladébauche ou John Canuck. On lui paiera même un interprète si ce monsieur ne comprend pas le français ou l’anglais.

Des centaines de milliers d’immigrants qui nous arrivent tous les ans, la plupart ne se recrutent pas parmi l’élite sociale de l’Europe. Un grand nombre ont vécu jusque-là sous des institutions beaucoup moins libérales. Souvent la misère les a aigris contre la société et ils voient ici l’occasion de se venger à peu de risque. S’il est vrai qu’ « il faut des châtiments dont l’univers frémisse », ils doivent trouver que le gros jeu vaut la petite chandelle.

Que t’en semble, mon oncle ? M’écoutes-tu ?…

On a parlé de la conscience populaire, mais c’est là, je crains, quelque chose de bien relatif et de bien instable. Sous ce rapport aussi, ma candeur a été offusquée récemment.

Une jeune fille est assassinée à Saint-Sauveur. La conscience populaire s’émeut, s’indigne, manifeste. On inculpe du meurtre un jeune homme que les circonstances paraissent désigner. Du moment que la justice met le grappin dessus, il