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félix maderleau

tourée de sa gangue d’inconscience. Quels sont, en effet, les spectacles que nous goûtons le plus ? Un match de boxe, une joute de hockey, des mascarades de Saint-Jean-Baptiste, un poisson qui se tord sous le dard, un élan qui fuit en bramant tandis qu’il perd ses entrailles d’une plaie béante au poitrail, etc. Plus récemment, c’est le cinéma picaresque ou le mesquin poker, ce qui indique tout de même un progrès… Ne dit-on pas qu’il y a, à Montréal, des gendelettes qui prennent Milo pour un sculpteur célèbre, Épinal pour un imagier fameux et Camembert pour une des gloires de la tribune française… Mais, Tarieu ! où vont nos intellectuels de passage à Paris ou à New-York ? Au Moulin Rouge, à Coney Island, dans les beuglants, les bouibouis ou les bouges où la bête humaine trouve son compte… Que voulez-vous, nous sommes les fils ou les petits-fils de bûcherons, de cageux, de coureurs de bois, de voyageurs, etc. Nous sommes des rustres et des rustres nordiques aux appétits carnivores et alcooliques et aux instincts grossiers… Naguère encore, nos réunions sociales étaient des beuveries, des repues franches qui étaient manquées si elles ne se terminaient par des batailles à poings nus. Et ces temps ne sont pas si éloignés !… Ce n’est pas que ces types-là manquent d’intérêt mais, enfin, ils sont à cent lieues du décadentisme que prône l’écolerie littéraire. Peut-être dans cent ans d’ici, aurons-nous