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une cause célèbre

cinthe plein de fougue et d’allant et qui fit parler de lui depuis : Mtre Honoré Mercier. Mercier accusait déjà le tempérament d’apôtre, l’activité, l’enthousiasme, toutes ces qualités du cœur et de l’esprit qui finirent par déborder les bornes un peu resserrées du prétoire pour se donner libre cours dans l’arène plus large et mieux adaptée à ses aptitudes où se débattent les grandes questions publiques, où se revendiquent les précieuses prérogatives populaires, où s’élaborent enfin les destinées d’un pays.

Tout jeune qu’il fut de 26 ans, Mercier avait déjà de la personnalité. Plein de ressources intellectuelles, il était d’une souplesse étonnante et d’une habileté déconcertante pour dérouter un adversaire en aiguillonnant le débat sur une fausse voie, quitte à emporter la position d’assaut par un retour imprévu, souvent plus brillant que formidable où il mettait tous ses moyens. Il excellait surtout à donner aux points faibles une apparence de force et de plausibilité, ce qui prêtait encore plus de relief et de solidité aux aspects sérieux de la cause. Les subtiles distinctions d’école, les doctes controverses émaillées de sentences latines, tout l’attirail du byzantinisme judiciaire était chez lui affaire de stratégie plutôt que de mentalité. C’était par système et non par tempérament qu’il épluchait des écrevisses ou fendait un cheveu en quatre avec la massue d’Hercule. Plus avocat que jurisprudent, il avait le cœur et l’âme du métier plutôt que la tête. C’est également ce qui fit sa faiblesse en politique. Le cœur est un luxe coûteux ; il coûte les yeux de la tête et parfois la tête même. Plus on est astre, plus radieux son orbite et plus il faut savoir écarter les satellites que la cupidité pousse à y graviter.

Pour la défense occupait Mtre Jean-Baptiste Bourgeois, une autre célébrité du Barreau mascoutain lequel en a fourni un bon nombre. Bourgeois s’acheminait lentement mais sûrement vers la magistrature qu’il devait atteindre dix ans plus tard. Moins délié, moins souple que son adversaire, il était plus solide. Sa formation juridique était plus substantielle si sa