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bert eut tôt fait de se convaincre qu’il était humainement impossible le traîner la pirogue à travers le fourré.

Reconnaissants à la Providence de les avoir conduits sains et saufs jusque-là, les jeunes gens, résolus et confiants, s’engagèrent de cœur léger dans le bois.

Ils éprouvèrent, tout d’abord, un véritable soulagement tant l’immobilité qu’ils avaient dû garder avait engourdi leurs membres. La fatigue cependant ne tarda pas à se faire sentir. Une gymnastique suivie qui succédait, sans que la transition fut le moindrement ménagée, à la torpeur résultant du défaut d’exercice devait amener la lassitude à brève échéance. Déjà leur entrain ralentissait, leur progrès était moins sensible. Ils dépensaient plus d’énergie pour obtenir un résultat moindre. À ce compte, il était facile de prévoir ce qui devait fatalement arriver. En physiologie comme en physique, toute activité qui ne se récupère pas est infailliblement vouée à l’extinction. Cette vérité est tellement élémentaire, banale même qu’elle corrige ce que la formule a de pédantesque. Quelque puissante que soit l’énergie motrice, que voulez-vous qu’elle tire d’un mécanisme détraqué ?

Le taillis était épais, presque inextricable. Des épinettes abattues par le vent barraient la marche et les dards de leurs branches faisaient des hérissements de chevaux de frise. Il ne fallait pas perdre de vue l’Alsiganteka car c’était lui le cicérone, le guide qui traçait l’itinéraire à suivre. On avançait péniblement, enfonçant à mi-jambe dans des fondrières ou buttant sur des arrachis ou des chicots. Un marécage s’interposait. Pour le contourner, ils s’éloignaient du fleuve, avançaient en sondant le terrain, re-