m’annoncer le résultat, quel qu’il fût. Sur ce, Hartmann de dire avec grandiloquence : « Si vous êtes, ce soir, membre de l’Institut, je sonnerai deux fois et vous me comprendrez ! »
J’étais en train de faire travailler au piano, l’esprit tout à mon devoir, les Promenades d’un Solitaire, de Stéphen Heller (ah ! ce cher musicien, cet Alfred de Musset du piano, ainsi qu’on l’a appelé !), lorsque deux coups de sonnette précipités se firent entendre. Mon sang se retourna. Mon élève ne pouvait en deviner le motif.
Un domestique entra vivement et dit :
« Il y a là deux messieurs qui veulent embrasser votre professeur ! » Tout s’expliqua. Je sortis avec ces Messieurs, plus ébahi encore qu’heureux et laissant mon élève beaucoup plus content que moi-même peut-être.
Lorsque j’arrivai chez moi, rue du Général-Foy, j’avais été devancé par mes nouveaux et célèbres confrères. Ils avaient déposé chez mon concierge, leurs félicitations signées : Meissonier. Lefuel, Ballu, Cabanel. Meissonier avait apporté le bulletin de la séance signé par lui, indiquant les deux votes, car je fus élu au second tour de scrutin. Voilà, certes, un autographe que je ne recevrai pas deux fois dans ma vie !
Quinze jours après, selon l’usage, je fus introduit dans la salle des séances de l’Académie des Beaux-Arts par le comte Delaborde, secrétaire perpétuel.
La tenue du récipiendaire était l’habit noir et la cravate blanche ; en me rendant à l’Institut pour cette réception — le frac, à trois heures de l’après-midi ! — on aurait cru que j’étais de noce.