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Page:Massenet - Mes souvenirs, 1912.djvu/20

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AVANT-PROPOS

de conscience, plaçait la conscience à la base même de sa méthode éducative ?

Un jour que j’étais seul et que je m’amusais, en manière de distraction, à fureter dans les armoires, j’y découvris des tablettes de chocolat. J’en détachai une et la croquai.

J’ai dit quelque part que j’étais… gourmand. Je ne le nie pas. En voilà une nouvelle preuve.

Lorsqu’arriva le soir et qu’il me fallut écrire le compte rendu de ma journée, j’avoue que j’hésitai un instant à parler de la succulente tablette de chocolat. Ma conscience, cependant mise à l’épreuve, l’emporta et je consignai bravement le délit sur l’agenda.

L’idée que ma mère lirait mon crime me rendait un peu penaud. À ce moment, ma mère entra, elle vit ma confusion, mais aussitôt qu’elle en connut la cause, elle m’embrassa et me dit : « Tu as agi en honnête homme, je te pardonne, mais ce n’est pas une raison, toutefois, pour recommencer à manger ainsi, clandestinement, du chocolat ! »

Quand, plus tard, j’en ai croqué et du meilleur, c’est que, toujours, j’en avais obtenu la permission.

C’est ainsi que mes souvenirs, bons ou mauvais, gais ou tristes, heureux ou non, je les ai toujours notés au jour le jour, et conservés pour les avoir constamment à la pensée.